Terezin Plage, roman

Morten Brask

Les Presses de la Cité

  • Conseillé par
    5 février 2012

    Terezin Plage est juste et admirable dans le tableau qu’il fait de la vie dans le ghetto. Il traite d’un fait historique (les camps de concentration) repris mainte fois dans la littérature et pourtant, on y découvre ici un nouvel aspect : lieu transitoire en attente de déportation vers Auschwitz, Theresienstadt, présenté comme une ville modèle juive, était avant tout un lieu de propagande des S.S. L’auteur apporte beaucoup de crédibilité à son récit et incite ainsi le lecteur à s’intéresser et à en connaitre plus sur cette intrigante bien qu’effroyable forteresse. On s’aperçoit d’ailleurs bien vite à quel point il s’est documenté.



    Les scènes sont très réalistes, souvent choquantes et parfois insoutenables. Partageant avec les détenus leurs peurs et leurs douleurs, on est toutefois bercé par le sentiment d’espoir que le protagoniste semble ne pas vouloir quitter et par l’envie d’arriver au bout du livre le cœur plus léger. Aussi vraisemblable et riche qu’un document, Terezin Plage reste tout de même une fiction, dans laquelle Morten Brask apporte une touche poétique avec les souvenirs d’enfance du personnage. En effet, Terezin Plage ne se limite pas à un descriptif des atrocités des camps, c’est également l’histoire d’une rencontre et l’histoire d’un homme avec son passé. Au fil des jours, Daniel se remémore sa jeunesse entre son père trop sévère, juge à la cour suprême, et sa mère fragile, dépressive. Ces flash-back donnent des précisions biographiques sur le narrateur et permettent d’en apprendre plus sur l’homme qu’il est aujourd’hui.
    Morten Brask a habilement mélangé les faits et les souvenirs : on passe régulièrement du présent (dans le ghetto de Theresienstadt) au passé (dans la maison de Daniel au bord de l’eau), permettant de s’échapper de l’horreur. Même si la transition entre les deux reste parfois brutale, on retrouve au final deux histoires en une. C’est une des raisons qui m’ont fait aimer ce livre, le trouvant à la fois cruel et poétique.

    Terezin plage reste une lecture tragique sur les camps de concentration de la seconde guerre mondiale. Ce qui change tout de même des autres romans portant sur ce même thème, c’est le parti pris de l’auteur de mettre en avant les sentiments d’amour qui unie les deux personnages principaux, Daniel et Ludmilla. Ce sentiment, pourtant improbable au début du récit, nait et se construit tout au long de l’histoire, portant en lui l’espoir d’une vie meilleure loin de la guerre.
    Le début est assez difficile tant les descriptions sont précises, mais l’auteur, avec beaucoup de sensibilité, réussit à faire ressortir une certaine beauté et légèreté. Peu à peu l’horreur fait place à des sentiments plus doux où une pointe de sensualité arrive même à se dégager. Ce sentiment d’Amour apporte au final une certaine beauté au récit. Malgré le désespoir et la cruauté, Daniel tient le coup grâce à l’amour qu’il a pour Ludmilla. Cet amour les aide à dépasser leur quotidien et à deux ils réussissent à se créer des moments de bonheur. On s’attache d’ailleurs très rapidement à ces deux êtres fragiles, chacun trainant son passé douloureux, et on s’inquiète surtout quant à leur sort, d’autant que l’on apprend rapidement que Ludmilla est malade et que diagnostic de la tuberculose ne fait pas de doute.

    Le style de Morten Brask est limpide, les pages défilent très vite (l’utilisation du présent n’y est pas pour rien) et on est vraiment projeté dans les lieux, ressentant toutes les émotions des personnages : peur, joie, dégoût, tristesse, bonté, soulagement… Terezin plage est un roman poignant, qui touche tous les sentiments et on en ressort fortement ému et touché par la cruauté du contexte historique, par l’amour qui lie Ludmilla et Daniel et par l’enfance de ce dernier. C’est un roman nuancé où l’horreur est adouci par une belle écriture et une triste histoire d’amour : « Elle m’embrasse. Elle suçote ma bouche avec la douceur d’un nuage de sucre glace, un essaim de papillons vole dans mon estomac, je ferme les yeux et plus rien n’existe que les lèvres de Ludmilla contre les miennes » (page 213).
    C’est tout simplement un roman bouleversant !


  • Conseillé par
    14 septembre 2011

    Un beau roman

    Terezin Plage est un roman de la rentrée littéraire que j’avais très envie de lire, et je n’ai pas été déçue ! Ayant visité le ghetto de Terezin pendant mes années lycée, j’étais vraiment très intriguée par cet ouvrage.
    Cet ouvrage est un roman basé sur des faits historiques. Le ghetto de Terezin (Theresienstadt en Allemand) servait à l’extermination de certains juifs et était un lieu transitoire pour d’autres en attente d’être transférés à Auschwitz. Mais pour l’extérieur, et d’après la propagande des S.S., Terezin était une ville juive modèle.
    Tout ceci est très bien illustré dans Terezin Plage.


    Daniel, un étudiant en médecine est envoyé à Terezin. Il fait alors tout son possible pour vivre le moins mal possible. En tant que médecin, il s’évertue à guérir et accompagner les malades. Car tous sont condamnés. Même ceux atteints de maladies bénignes sont promis à la mort. En effet tous les bâtiments tombent en lambeaux, aucune salle n’est chauffée, aucun médicament n’est à disposition, les opérations se font sans anesthésie, bon nombre de malades dorment par terre faute de lits, les patients ont droit à une douche froide par moi, et bien entendu ils ne mangent pas à leur faim.
    Malgré la misère et le désespoir ambiant, Daniel tient bon, car il est amoureux de Ludmilla. Leur histoire d’amour, discrète et tout en pudeur leur amènera un peu de chaleur et d’espoir pour survivre.
    Au milieu du roman, les S.S. ordonnent une mise en scène visant à embellir et fausser la vision du camp en vue d’une visite de la Croix Rouge danoise. Tous sont priés de participer à ce mensonge. Les malades sont remplacés par des personnes en bonne santé feignant d’être en rémission, les placards sont remplis de médicaments, les draps sont lavés, des cafés-jazz sont construits pour faire croire à une vie agréable…
    J’ai beaucoup aimé ce roman. Malgré quelques longueurs, les conditions de vie du ghetto sont vraiment bien décrites et on peut ressentir l’horreur et la peur qui submergent les juifs à chaque décès, à chaque apparition de S.S., à chaque nouvelle liste annonçant un départ vers Auschwitz.
    Le récit est très bien construit et oscille entre la vie dans le ghetto et les souvenirs d’enfance de Daniel, cat tout l’y renvoie : un parfum, un rire, une couleur…
    Je vous conseille donc ce roman. Il est beau, juste et délicat…